SEPTIEME DEGRE De la tristesse qui produit la Joie. |
1. La tristesse selon Dieu, est une affliction du coeur et un sentiment de douleur qu’éprouve une âme pénitente : sentiment ineffable qui lui fait rechercher avec ardeur ce qu’elle désire avec transport; qui, lorsqu’elle n’a pu obtenir ce bien désirable, le lui fait poursuivre avec d’incroyables travaux, et qui, lorsqu’elle voit qu’elle ne peut l’obtenir, lui fait pousser des cris de douleur et des gémissements lamentables. 2. Si vous voulez, cette tristesse est un aiguillon précieux de l’âme qui, par les heureuses piqûres qu’il lui fait, la délivre et la purifie de toutes les affections terrestres, et qui, par la douleur qu’il lui cause, la fixe et l’attache uniquement à veiller sur elle-même et à prendre soin de son salut. 3. La componction que les moines appellent componction religieuse, est un remords de la conscience par lequel celle-ci force une âme à s’accuser intérieurement coupable et criminelle, et par cette confession intérieure l’embrase d’un feu tout divin, et lui procure un merveilleux rafraîchissement. 4. Or cette confession fait encore qu’on oublie les besoins de la nature, selon cette parole de David : « J’ai oublié de manger mon pain et de prendre ma nourriture. » (Ps 101,5) 5. La pénitence est une joyeuse et agréable renonciation à toute sorte de consolations humaines. 6. Le silence et la tempérance sont l’heureux partage de tous ceux qui font des progrès dans cette tristesse salutaire. La douceur et l’oubli des injures ornent le coeur des personnes qui, par des combats soutenus avec courage, ont obtenu quelque victoire; enfin ceux qui sont heureusement parvenus à la perfection de cette bienheureuse tristesse, sont remplis d’affection et d’amour pour la pratique de la plus profonde humilité, sont dévorés d’une soif ardente pour les mépris et les humiliations, d’une faim violente pour toutes les choses qui alarment et font crier la nature; du reste, ils brûlent pour leurs frères d’une charité si pure et si forte, que, non seulement ils les excusent dans les fautes qu’ils leur voient commettre, mais que leur coeur est touché à leur égard d’une compassion toute céleste. Nous devons approuver ceux qui ont fait quelques progrès, louer ceux qui ont remporté quelques victoires, et proclamer heureux ceux qui sont affamés d’humiliations et de souffrances : car ces derniers seront rassasiés de cette nourriture céleste qui n’inspire jamais du dégoût. 7. Si donc vous avez eu le bonheur d’obtenir le don des larmes, employez tous les moyens capables de vous le conserver. Car, de même que la cire se fond facilement au feu, ainsi ce don, quand il n’a pas encore poussé des racines profondes dans une âme, s’y perd et disparaît bien vite par les inquiétudes de l’esprit, par les soins qu’on prend du corps, par les plaisirs sensuels, et surtout par la démangeaison de parler, par la légèreté et par la pétulance. 8. Et, oserons-nous le dire ? Cette heureuse source de larmes est, en quelque sorte, plus forte et plus puissante que les eaux du baptême. En effet, le baptême nous purifie des fautes dont nous sommes coupables avant de recevoir ce sacrement; mais le don des larmes nous purifie de toutes les fautes que nous pouvons ensuite commettre dans le cours de notre vie. Le baptême que nous avons reçu dans notre enfance, nous avait conféré une grâce infiniment précieuse, et nous avait placés dans un état tout surnaturel; mais les péchés dans lesquels nous sommes misérablement tombés, nous ont fait perdre cette grâce inestimable et cet heureux état; et le don des larmes nous fait recouvrer cette grâce, et rétablit, en quelque sorte, notre baptême en nous. Avouons qu’ils seraient bien rares les hommes qui pourraient parvenir au salut, si Dieu, dans son infinie Bonté, n’eût pas accordé ce don des larmes. 9. Voyez comme les gémissements et l’affliction d’un coeur contrit et repentant pénètrent jusqu’au trône de Dieu; comme les saintes larmes que fait répandre la crainte du Seigneur, sont comme des députés que nous envoyons devant nous pour lui demander grâce et miséricorde; et comme celles que son Amour nous fait verser, nous donnent une délicieuse assurance que nos prières et notre repentir lui ont été agréables. 10. Mais remarquons bien que, si rien n’est plus conforme ni plus favorable à la véritable humilité que les larmes d’une pénitence sincère, rien aussi ne lui est plus contraire et plus nuisible que la dissipation d’une joie mondaine. 11. Conservez donc, autant que vous en serez capable, la tristesse salutaire d’une sainte componction; elle vous procurera la joie solide et véritable; ne cessez de l’augmenter et de la perfectionner en vous jusqu’à ce qu’elle vous ait dégagé de toutes les choses de la terre, purifié votre âme de toutes ses souillures, et présenté au Christ votre sacrifice tout pur et tout saint. 12. Efforcez-vous continuellement et par la mortification de vos sens, et par le recueillement de votre esprit, et par une profonde méditation, de vous représenter fortement cet abîme immense, cette fournaise embrasée par des flammes ténébreuses, ce juge sévère et inexorable, ce vaste chaos des feux éternels, ces descentes étroites et obscures de ces lieux souterrains, de ces maisons désespérantes et de ces gouffres profonds. Oui, gravez avec force dans votre esprit l’idée et l’image de toutes ces choses effrayantes, et d’autres semblables, afin que, si votre coeur se portait malheureusement à une vie molle et relâchée, frappé d’une juste terreur, il s’applique à se procurer une chasteté incorruptible, et que, par les sentiments d’une tristesse salutaire il puisse jouir des lumières spirituelles, et devenir plus pur et plus lumineux que les flammes les plus pures et les plus resplendissantes. 13. Lorsque vous vous livrez au saint exercice de la prière, soyez devant Dieu comme un criminel devant son juge; tremblez et faites en sorte que, par l’humble posture de votre corps, mais plus encore par les dispositions intérieures de votre âme, vous ayez le bonheur d’apaiser sa juste Indignation : car Il ne peut pas rejeter une âme qui se présente à Lui de la même manière que cette veuve désolée dont il est parlé dans l’Évangile, et qui, par la ferveur et la persévérance de sa prière, continue de frapper à la porte de sa Bonté suprême. 14. Celui qui a reçu le don des larmes se trouve bien, pour pleurer ses péchés, dans quelque lieu que ce soit; mais celui qui ne pleure que par des motifs humains, choisira les endroits qui conviendront à ses dispositions naturelles, et se réjouira d’avoir des témoins de ses larmes. 15. Comme un trésor qui est caché est moins exposé à la rapacité des voleurs que celui qui est à la vue de tout le monde; de même les larmes intérieures sont moins exposées à se perdre que les larmes extérieures. 16. Gardez-vous bien d’imiter ceux qui ensevelissent leurs morts : vous les voyez pleurer un moment sur leurs tombeaux, et un instant après vous les rencontrez dans une ivresse complète. Figurez-vous donc que vous travaillez avec ceux qu’on a condamnés aux mines, et qui à toute heure sont cruellement frappés par les personnes chargées de les surveiller. 17. Celui qui tantôt pleure, et tantôt se livre à la joie et au plaisir, ne ressemble que trop à un homme qui, pour se débarrasser d’un chien errant, lui jette du pain au lieu de lui jeter des pierres : n’est-il pas évident que tout en faisant semblant d’éloigner cet animal, il l’engage à s’attacher à lui et à le suivre ? 18. Vous donc, qui pleurez vos péchés, soyez ennemis de toute ostentation, et appliquez-vous uniquement à la garde de votre coeur. Les démons redoutent autant les personnes qui vivent dans le recueillement et la vigilance, que les voleurs craignent les chiens pendant la nuit. 19. Mes amis, Dieu, en nous appelant à la vie monastique, ne nous a pas appelés à des noces pour nous y livrer à la joie; mais Il veut que nous nous pleurions nous-mêmes. 20. Il en est qui, par une erreur pitoyable, lorsqu’ils répandent des larmes de douleur et de repentir, se font violence pour ne penser à rien. Ils ignorent que les larmes, sans les bonnes pensées, peuvent convenir à des créatures privées de raison, mais absolument pas à des créatures douées d’intelligence et de raison; car les larmes ne naissent-elles pas de la pensée ? et n’est-ce pas l’esprit et la raison qui produisent les pensées ? 21. Lorsque vous allez prendre votre repos, ayez soin de vous mettre dans la même position dans laquelle vous serez au tombeau, et vous goûterez moins les douceurs du sommeil. Quand vous serez à table, pensez à cette table triste et funèbre où vous servirez vous-même de nourriture aux vers et vous serez moins tenté, de vous livrer à la sensualité. Vous sentez-vous pressé de soif, et vous soulagez-vous ? Souvenez-vous de cette soif dévorante que souffrent les damnés au milieu des flammes de l’enfer, et vous ferez violence à la nature, en ne lui accordant pas tout ce qu’elle demande. 22. Notre Seigneur nous éprouve-t-il par des humiliations déshonorantes et honorables tout à la fois ? Nous fait-il des reproches amers, et nous inflige-t-il des pénitences rigoureuses ? Rappelons de suite en notre mémoire cette sentence foudroyante du souverain Juge : « Retirez-vous de moi, maudits » (Mt 25.41), et ce souvenir, comme une épée à deux tranchants, percera et fera mourir en nous les injustes et funestes sentiments de tristesse et d’amertume, et nous portera fortement à vivre dans la patience et la résignation. 23. Le temps, au rapport du saint homme Job, fait retirer la mer (cf. Job 14,11), et le temps par le moyen de la patience, nous fera acquérir et perfectionnera en nous les vertus dont nous venons de parler. 24. Que la pensée des flammes éternelles vous accompagne le soir, lorsque vous vous mettez au lit; que le matin elle préside à votre réveil, et soyez bien assuré que la paresse et la négligence ne seront jamais le partage de votre coeur; vous en serez surtout préservé pendant vos prières et la récitation des psaumes. 25. Que les soins que vous prendrez de votre corps, et l’habit monastique que vous portez, vous excitent à pleurer vos fautes; car ceux qui portent le deuil, se revêtent d’habits de couleur minime. Si vous ne pleurez pas, pleurez au moins de ne pouvoir pas pleurer; et si vous pleurez, que ce soit parce que vos péchés vous ont fait perdre l’état heureux dans lequel vous étiez par la grâce et l’amitié de Dieu, et qu’ils vous ont réduit à l’état pénible où vous vous trouvez. 26. Dans nos pleurs et dans notre pénitence, comme dans toute autre chose, Dieu, qui est un juge plein de clémence et d’équité, aura égard à notre faiblesse. Il m’est arrivé plus d’une fois de voir des personnes qui, ne versant que très peu de larmes, les répandaient avec une si grande douleur, qu’on les aurait prises pour des gouttes de sang, et d’en voir d’autres qui pleuraient abondamment et sans effort. Or j’estime plus la violence de la douleur que l’abondance des larmes; et je crois que Dieu même n’en juge pas autrement. 27. Il ne convient pas à ceux qui pleurent, de traiter et de s’occuper de matières relevées et de questions théologiques : une pareille occupation pourrait fort bien faire tarir la source de leurs larmes; car celui qui s’applique à ces sciences, est semblable à un docteur gravement assis dans une chaire pour donner avec autorité des leçons aux autres; tandis que celui qui pleure ses fautes, ne doit avoir de la ressemblance qu’avec un homme assis sur le fumier et couvert d’un sac et d’un cilice. C’est pour cette raison que David, quelque grande que fût sa science et quelque profonde que fût sa sagesse, répondit et ceux qui lui demandaient à chanter des cantiques : « Comment pourrions-nous chanter des cantiques à la louange du Seigneur, dans, une terre étrangère »; (Ps 136,4), c’est-à-dire dans le pays où nos péchés nous ont conduits en captivité. 28. Dans le cours naturel, il est des choses qui ont du mouvement par elles-mêmes; mais il en est d’autres qui ne le reçoivent que d’une cause étrangère. Or dans la pénitence de nos péchés, il y a des larmes qui coulent toutes seules de nos yeux; mais aussi il y en a que nous ne répandons qu’avec effort et violence. Quand donc sans mouvement et sans peine nous nous trouvons attendris, et que nous répandons avec abondance des larmes d’une douceur céleste, c’est à ce moment heureux que nous devons nous hâter de courir vers le Seigneur; car c’est une preuve que, sans L’en avoir prié, il est venu à nous pour nous faire présent de l’éponge mystérieuse de la tristesse qui lui est agréable, pour créer en nous une source d’eau rafraîchissante, et pour nous faire don de ces larmes heureuses qui effacent nos péchés sur le livre de son éternelle Justice. Conservons-le précieusement avec le plus grand soin, et gardons-le jusqu’à ce qu’Il juge à propos de nous le retirer Lui-même; car cette douleur, que sa grâce produit en nous, a bien plus de vertu pour nous purifier de nos fautes que celle que nous exciterions nous-mêmes dans nos coeurs par beaucoup d’efforts et de violence. 29. Il n’a sûrement pas reçu de Dieu le don des larmes, celui qui pleure quand il veut, mais celui qui pleure ce qu’il veut pleurer, ou plutôt, qui pleure les choses que Dieu veut qu’il pleure. 30. Il n’arrive que trop qu’aux larmes de la pénitence nous mêlons les larmes de la vaine gloire, qui est si odieuse à Dieu. C’est la prudence et la véritable piété qui nous font connaître cette fausse tristesse. Eh ! Comment pourrions-nous compter sur la sincérité de nos larmes, si, tout en les répandant, nous négligeons de nous corriger de nos défauts ? 31. La vraie componction est exempte de toute enflure du coeur et de toute vanité à elle ne nous procure aucune consolation humaine, mais elle nous entretient continuellement dans la pensée de notre dernière heure, et nous fait attendre de Dieu, seul Consolateur des humbles de coeur, les consolations et les douceurs ineffables qui doivent être pour nous un bain de rafraîchissement et de paix. 32. Tous ceux qui ont reçu cette divine et consolante affliction, ont une sainte aversion pour la vie présente, la regardent comme la source et le principe funestes de toutes leurs peines et de toutes leurs misères, et sont animés contre leurs propres corps de la même haine qu’on a contre un ennemi qui veut nous perdre. 33. Si donc nous apercevons, dans ceux qui croient eux-mêmes être vraiment affligés selon Dieu, quelques mouvements de colère et quelques sentiments d’orgueil, nous pouvons, sans craindre de nous tromper, juger que leurs larmes ne sont pas sincères et qu’elles ne sont pas produites par une véritable componction; car, comme le dit saint Paul : « Qu’y a-t-il de commun entre la lumière et les ténèbres » (2 Cor 6,14) ? 34. La vraie componction répand des consolations dans les âmes; la fausse n’y produit que l’orgueil. 35. De même que le feu consume la paille, ainsi les larmes sincères consument et font disparaître entièrement les souillures visibles ou invisibles de l’âme. 36. Plusieurs pères n’hésitent pas de prononcer que ce n’est pas une chose peu difficile que de distinguer les larmes qui sont sincères, de celles qui ne le sont pas, principalement dans les personnes qui commencent leur pénitence, et que le discernement qu’on en fait, est rempli de ténèbres et d’obscurité; car, disent-ils, elles peuvent être produites par plusieurs causes différentes : c’est tantôt par un sentiment tout naturel, tantôt par un sujet louable, et tantôt par une cause blâmable; ici c’est la vaine gloire, c’est un amour déréglé et profane qui en sont le principe; là c’est l’amour de Dieu, c’est la pensée de la mort, ce sont plusieurs autres bonnes considérations qui les produisent. 37. Or après nous être servis de la crainte de Dieu pour découvrir et connaître quelle est la source de celles que nous répandons, tâchons de nous procurer celles que fait verser la pensée de notre dernière heure, car elles sont pures et sincères, ces sortes de larmes; elles ne sont susceptibles ni de vanité ni d’illusion, elles purifient notre âme et allument dans nos coeurs le feu du saint amour de Dieu; enfin elles effacent nos péchés, et nous procurent le bien inestimable de la paix du coeur. 38. Gardons-nous d’être surpris et étonnés, si quelquefois des larmes produites par une douleur sincère du péché et par une autre cause bonne et non suspecte deviennent cependant mauvaises et condamnables; mais ce qui doit nous frapper d’étonnement, c’est de voir que des larmes qui, dès le commencement, n’ont eu qu’un mauvais principe et une source empoisonnée, aient pu devenir saintes et surnaturelles. Les personnes portées à la vaine gloire, ne manqueront pas de comprendre ce que nous voulons dire. 39. Ne comptez pas sur l’abondance de vos larmes, si vous ne vous sentez pas purifié de vos péchés. Le vin qu’on vient de tirer du pressoir, ne mérite ni blâme ni louange. 40. Personne ne doute que les larmes produites par la grâce de Dieu ne nous soient souverainement utiles et salutaires; mais ce ne sera qu’à la mort que nous en connaîtrons parfaitement l’utilité et les avantages précieux. 41. Celui donc qui passe sa vie à répandre des larmes constamment agréables à Dieu, célèbre tous les jours de nouvelles fêtes spirituelles; tandis que celui qui coule ses jours dans les plaisirs et dans les joies profanes, pleurera dans les siècles infinis de l’éternité. 42. Eh quoi ! Les criminels peuvent-ils goûter quelque plaisir dans la prison ? Comment donc les véritables moines en auraient-ils sur la terre ? Et n’est-ce pas dans ce sentiment que parlait ce grand pénitent, si célèbre par la sincérité et la pureté de ses larmes, lorsqu’il disait : « Tirez, Seigneur, mon âme de ce lieu, où je suis enfermé » (Ps 141), afin que je tressaille d’allégresse dans le sein de votre lumière incompréhensible. 43. Soyez au milieu de votre coeur comme un général au milieu de son armée; ordonnez-lui avec une autorité absolue toutes les pratiques de la plus profonde humilité. Ainsi que, quand vous commanderez à la joie de se retirer de vous, en lui adressant ces paroles : va-t’en, elle s’en aille; et que quand vous direz aux larmes : venez, elles arrivent; et à votre corps, qui est votre esclave : fais cela, il le fasse (cf. Mt 8,9). 44. Quiconque s’est revêtu du don des larmes comme d’une robe nuptiale, sentira quelle est la douceur inexprimable, de la joie spirituelle. 45. Quel est le moine qui ait si saintement vécu, pour pouvoir dire que, depuis qu’il est entré en religion, il n’a pas perdu un seul jour, une seule heure, ni un seul moment; mais qu’il a consacré au service de Dieu sa vie tout entière, dans la pensée qu’un jour passé ne revient plus ? 46. Ce moine est vraiment heureux, lequel, par la vivacité de sa foi, peut contempler la beauté des anges, et jouir ainsi de la société de ces Intelligences célestes; mais il est bien autrement heureux celui qui, par la méditation de la mort, par le souvenir amer de ses péchés, et par les larmes abondantes de sa fervente pénitence, s’est mis dans l’état heureux de ne plus retomber dans le péché. Or on pourrait difficilement, je crois, me persuader que, pour arriver à la perfection du premier état, il ne faille pas auparavant avoir passé par le second état dont nous venons de parler. 47. J’ai vu des pauvres dont la hardiesse a été au point de s’adresser directement à des rois, et qui les ont pressés avec des paroles si ingénieuses et des manières si engageantes, qu’ils les ont attendris sur leur misérable position et les ont portés à prendre pitié de leur misère. Mais j’ai vu aussi des pauvres d’une autre espèce, lesquels, manquant absolument de vertu, se sont adressés au Roi du ciel. Ils réclamaient son secours et ses faveurs avec une persévérance et, une assiduité qu’on pourrait appeler importunes : ils n’employaient pas pour cela des expressions choisies et étudiées, mais se contentaient de lui exposer leurs nécessités pressantes avec une modestie parfaite, une humilité profonde et une crainte respectueuse; ils ne cessaient de Lui exprimer les sentiments de leur indignité, et de lui répéter avec l’accent d’une douleur profonde et d’une conviction entière, qu’ils ne méritaient pas d’être écoutés ni d’être exaucés; et cependant cette violence qu’ils lui ont faite, en agissant ainsi, L’a en quelque sorte forcé d’avoir compassion d’eux, et de leur accorder ce qu’ils lui demandaient. 48. Celui qui sent de la vanité, parce qu’il a reçu le don des larmes, et qui condamne les autres, parce qu’ils en sont encore privés, ressemble parfaitement à un sujet qui demanderait des armes à son souverain, et qui, les ayant obtenues, au lieu de s’en servir contre les ennemis de son prince, s’en servirait pour se percer et se donner la mort. 49. N’oublions pas ici que Dieu n’a pas besoin de nos larmes, et qu’Il n’aime pas à voir que les inquiétudes et la tristesse dévorent et consument nos coeurs; mais qu’Il désire qu’embrasés du feu sacré de son Amour, nous goûtions et savourions les délices d’une joie toute pure et toute spirituelle. 50. Ôtez, le péché de votre coeur, et vous n’aurez plus de motifs de répandre des larmes. Pour quelle raison mettrait-on un emplâtre sur un des membres d’une personne qui n’a reçu aucune blessure ? Adam versa-t-il des pleurs avant sa fatale désobéissance ? Les justes en répandront-ils après la résurrection et l’abolition entière du péché ? N’est-il pas écrit qu’alors « il n’y aura ni pleurs, ni gémissements, ni douleur, ni affliction » (Apoc 21,4). 51. J’ai vu des personnes qui paraissaient être sans tristesse, quoique réellement elles fussent très affligées; mais à l’extérieur vous les auriez prises pour des gens dans la joie, et non dans l’affliction. Or l’Amour de Jésus Christ les a mises à l’abri de tout danger; les démons ne leur peuvent rien, car on peut leur appliquer ces paroles : « Le Seigneur éclaire les ténèbres des aveugles. » (Ps 145,8) 52. Souvent aussi il arrive que les larmes donnent de la vanité à ceux qui n’ont qu’une vertu faible et chancelante. Aussi par un trait admirable de sa Providence, Dieu les prive de ce don qui leur devient funeste, afin qu’en le désirant et en le demandant, ils s’affligent et se condamnent eux-mêmes, qu’ils vivent dans les soupirs et les gémissements, dans la douleur et la tristesse, dans de dures inquiétudes et dans une déchirante anxiété; car, dans les desseins de Dieu, toutes ces peines qu’ils endurent, leur tiennent lieu du don des larmes, et, quoiqu’il leur semble n’en retirer aucun fruit, elles leur sont infiniment avantageuses. 53. En observant attentivement les divers artifices du démon, nous verrons que très souvent il nous fait tomber dans une illusion bien funeste et bien propre à nous faire de la peine, et qu’il nous joue d’une manière bien fâcheuse. En effet est-il rare que, lorsque nous nous rassasions bien, et que nous contentons notre sensualité, il nous attendrisse lui-même, et nous fasse répandre des larmes en abondance; et que, lorsque nous avons fidèlement observé le jeûne et les règles de la tempérance, il nous endurcisse et fasse tarir la source de nos pleurs ? Or qui pourrait ne pas voir que, par les fausses larmes qu’il arrache à nos yeux, il veut que nous nous abandonnions à l’intempérance et à la sensualité, deux sources fécondes de vices ? Mais, au lieu de nous laisser prendre à ses pièges, ayons soin de faire le contraire de ce qu’il nous suggère. 54. Quant à moi, je vous avoue qu’en considérant la nature de la componction du coeur, je suis frappé d’étonnement, et je ne peux me lasser d’admirer comment il peut se faire que la douleur et l’affliction de la pénitence renferment dans elles-mêmes la joie et l’allégresse, à peu près comme l’hexagone des abeilles renferme le miel. Mais que nous apprend cette merveille ? Que la tristesse et les larmes d’une âme contrite et pénitente sont vraiment et réellement un don de Dieu; car ce qui fait que cette âme repentante éprouve ce plaisir et cette joie intérieure, si douce et si consolante, c’est que Dieu Lui-même, d’une manière secrète et invisible, communique aux coeurs affligés et brisés par la douleur de leurs fautes, les douceurs et les consolations d’une joie toute céleste. 55. Mais rien, je crois, ne peut contribuer davantage à nous convaincre combien nous avons besoin de pleurer nos péchés, et combien les larmes d’une douleur sincère sont utiles à notre âme, que l’histoire vraiment extraordinaire et surprenante que je vais vous raconter : Il y avait dans le monastère où j’étais, un moine nommé Étienne; comme il aimait la vie solitaire et érémitique, depuis un grand nombre d’années il vivait entièrement séparé des frères, et s’était rendu recommandable par ses jeûnes rigoureux, par ses larmes abondantes et par d’autres vertus excellentes. Il avait fixé sa cellule au pied de la sainte montagne où Élie avait vu autrefois la présence de Dieu. Mais cet homme vraiment respectable, désirant pratiquer des exercices d’une pénitence plus austère et plus laborieuse, se retira au désert des Anachorètes, appelé Siden, et y vécut plusieurs années dans la plus sévère et la plus étroite discipline. Ce lieu, privé absolument de toute consolation humaine, était d’un abord presque inaccessible, et était éloigné de soixante-dix milles de toute habitation. Enfin ce saint vieillard, sur la fin de sa vie, revint trouver sa première cellule dans la montagne d’Élie, où il avait eu pour disciples deux moines de la Palestine, lesquels étaient fort pieux et sévères observateurs de la discipline religieuse. Ils étaient demeurés dans cette cellule pendant l’absence du saint vieillard, lequel, quelques jours après qu’il y fut revenu, tomba dangereusement malade, et cette maladie le conduisit au tombeau. La veille de sa mort il fut tout à-coup ravi hors de lui-même; et dans ce ravissement il regardait, tantôt à sa droite, tantôt à sa gauche; et comme si des personnes lui eussent fait rendre compte de sa vie, il leur répondait si haut, que tous ceux qui étaient présents pouvaient le comprendre. « Oui, disait il quelquefois, c’est vrai; j’ai commis cette faute, mais j’ai jeûné tant d’années pour l’expier »; et d’autres fois, « Non, je n’ai pas fait ce péché; vous m’accusez à tort. » Puis il ajoutait : « Je confesse que je me suis rendu coupable de cette faiblesse; mais j’ai pleuré, j’en ai fait pénitence et j’ai tâché de la racheter par de saints exercices et par des oeuvres de charité. Mais c’est absolument à faux que vous m’accusez cette fois » reprenait-il avec vivacité. Sur d’autres chefs, il disait : Vous avez raison; j’avoue que je suis coupable et que je n’ai rien à répondre pour me justifier; que je n’ai pour ressource que les Miséricordes de Dieu, en qui je mets toute ma confiance. » Or cet examen extraordinaire et si sévère était un spectacle effrayant et terrible, et autant plus terrible, que ce pauvre moine était accusé des fautes mêmes qu’il n’avait pas commises. Ah ! Juste ciel ! si un solitaire fervent, un anachorète qui, pendant quarante années passées dans la vie érémitique, avait pleuré amèrement ses péchés, et les avait expiés par toute sorte d’austérités, avoue cependant que, sur certaines fautes il n’a rien à répondre pour s’excuser, que pourrai-je donc devenir, moi ? Ne dois-je pas m’écrier : Malheur à moi ! Oui, malheur à moi, misérable, puisque ce grand solitaire n’a pas même pu fermer la bouche aux démons qui l’accusaient, par ces paroles d’Ézéchiel : « Le Seigneur a dit : Je vous jugerai selon vos voies » (Ez 33,13) ? Mais gloire soit rendue à Dieu, qui seul connaît les choses cachées ! Cependant je peux vous assurer que plusieurs personnes m’ont dit que tandis qu’il était au désert, ce bon solitaire donnait de sa propre main à manger à un léopard. Or ce fut pendant qu’il subissait cet examen rigoureux, et qu’on lui faisait rendre compte de sa vie, qu’il rendit son âme à Dieu, sans que nous ayons pu savoir quelle a été la fin de ce jugement, et quelle a été la sentence qu’il a reçue. 56. De même qu’une pauvre veuve, après la mort de son mari, ne trouve de consolation que dans un fils unique qui lui reste; ainsi une âme qui est tombée dans le péché, ne peut trouver quelque soulagement au moment qu’il faut quitter la vie, que dans les travaux pénibles qu’elle a supportés, dans les jeûnes rigoureux qu’elle a pratiqués, dans les larmes qu’elle a versées, et dans la pénitence qu’elle a faite. 57. Ces sortes de pénitents ne se permettent même pas de chanter en leur particulier des hymnes et des cantiques, parce que ces cantiques seraient capables d’étouffer leurs soupirs et de diminuer leurs larmes. Si donc vous prétendez que par le chant des hymnes, vous exciterez en vous les sentiments de la pénitence, sachez que vous êtes bien loin d’elle, et qu’elle est bien loin de vous. La pénitence est une douleur de l’âme laquelle demeure dans elle depuis longtemps, et lui est conservée par le moyen du feu de lamour. 58. Or cette pénitence précède, dans une âme, la paix et la tranquillité du coeur : c’est elle qui, en la purifiant, et en lui procurant la victoire sur les passions et sur les mauvaises habitudes, la revêt de son premier ornement. 59. Voici ce que m’a raconté de lui-même un homme illustre par une longue et rigoureuse pénitence : « Lorsque, me dit-il, j’étais tenté de me livrer à la vaine gloire, à l’impatience, à l’intempérance, le souvenir de ma pénitence s’y opposait fortement, et me faisait entendre au dedans de moi ces paroles sévères : Prends bien garde de te laisser aller à la vaine gloire, autrement je t’abandonnerai; et il en faisait autant par rapport aux autres tentations que j’éprouvais. Or j’avais coutume de lui répondre : Je ne vous désobéirai jamais, jusqu’à ce que vous puissiez me présenter avec assurance devant le tribunal de Jésus Christ. » 60. Mais, si une âme profondément pénitente et sincèrement affligée de ses péchés reçoit de Dieu des consolations ineffables, une âme pure et sainte reçoit de Lui des lumières extraordinaires. Or cette illumination divine est une impression douce et forte, qu’on ne peut ni exprimer, ni comprendre, ni voir : c’est la foi seule qui la fait comprendre, voir et sentir. Quant aux consolations d’une âme pénitente, c’est un certain rafraîchissement doux et agréable qui rend en quelque sorte cette âme semblable à un enfant qui pleure et rie presqu’en même temps. Ce rafraîchissement, par un effet admirable, renouvelle cette âme affligée, et fait que ses larmes, d’amères qu’elles étaient, deviennent douces et agréables. 61. Les larmes que produit la pensée de la mort, font naître la crainte de Dieu dans les coeurs; cette crainte de Dieu engendre la confiance, et cette ferme confiance en Dieu donne une joie parfaite, laquelle produit enfin la fleur divine de l’amour. 62. Repoussez loin de vous par un esprit d’une véritable humilité, toute joie étrangère, comme étant indigne de vous; et ne cessez de craindre que, par les tromperies du démon, vous ne receviez un loup dévorant, au lieu d’un pasteur de votre âme. 63. Prenez garde de vouloir, avant le temps, vous élever à une sublime contemplation; mais faites en sorte que, par la perfection de votre humilité, ce soit elle qui vous cherche et vous saisisse pour s’unir à votre âme par une union pure et indissoluble. 64. Voyez combien une âme religieuse a de ressemblance avec un petit enfant : à peine connaît-il son père, qu’on le voit rempli d’une joie qu’il ne peut exprimer; et, si pour de bonnes raisons son père s’absente, quand il revient, l’enfant témoigne à la fois son contentement et sa peine : son contentement, parce qu’il reçoit son père après une absence qui lui a bien duré; sa peine, parce qu’il a été privé si longtemps de sa présence. 65. Cette âme ressemble encore à un autre enfant. Voyez-vous cette mère qui se cache avec adresse et se dérobe à la vue de son fils ? Mais entend-elle ses cris plaintifs, et voit-elle couler ses larmes ? Alors, elle éprouve un plaisir délicieux. Elle lui apprend par là et lui fait sentir l’importance et la nécessité de ne pas s’éloigner de sa présence; et c’est ainsi qu’elle nourrit et qu’elle augmente dans son enfant l’affection qu’il a pour elle. Or, dit le Seigneur : « Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende ces paraboles. » (Luc 14,35). 66. Pense-t-il aux exercices du Gymnase et aux pièces qu’on doit jouer sur le théâtre, le criminel qu’on a condamné à la peine capitale ? Or, celui qui pleure des péchés qui lui ont mérité des tourments éternels, pourrait-il se livrer au plaisir, à la vaine gloire, à la colère et à la mauvaise humeur ? 67. La pénitence, qui est une vive et profonde douleur de l’âme, ne doit-elle pas lui fournir tous les jours de nouveaux sujets de s’affliger et de souffrir ? Et l’âme pénitente ne ressemble-t-elle pas à une femme qui est dans les douleurs de l’enfantement ? 68. Le Seigneur, dont la justice égale la sainteté, récompense, par le sentiment d’une componction pleine de foi, le moine qui, dans la solitude, vit selon la foi et les règles de la sainteté, comme il récompense, par d’ineffables consolations, le moine qui, pour des motifs louables, demeure dans un monastère pour y vivre saintement sous l’autorité et l’obéissance d’un supérieur. Mais celui qui, sincèrement et selon Dieu, n’embrasse pas l’un ou l’autre de ces deux genres de vie, se prive misérablement du don des larmes. 69. Éloignez et chassez loin de vous le démon du désespoir, c’est un chien enragé, qui, lorsque vous considérez avec douleur les péchés que vous avez commis, fait tous ses efforts pour vous représenter Dieu sans clémence, sans bonté et sans miséricorde; et, si vous y faites attention, vous verrez qu’avant de vous faire tomber dans les fautes que vous pleurez, ce misérable vous peignait vivement la bonté, la clémence et la miséricorde de Dieu, mais surtout son admirable facilité à recevoir les pécheurs et à leur pardonner. 70. Le saint exercice de la pénitence en produit l’heureuse habitude dans notre âme, et cette habitude nous la rend facile et agréable. Voilà pourquoi elle pousse dans nos coeurs des racines si fortes et si profondes, qu’elle ne peut pas facilement ensuite nous être enlevée. 71. Au reste ce serait en vain que nous nous livrerions aux plus excellents exercices de piété : si nous n’avons pas la douleur intérieure et sincère de nos péchés, nous ne sommes rien, et nous ne faisons rien; car à nous, qui avons souillé et perdu la grâce précieuse du baptême, qui avons chargé nos mains d’iniquités, il est d’une nécessité absolue de nous purifier, et, par le feu ardent et continuel du repentir et par l’huile de la miséricorde de Dieu, de faire fondre cette poix crasseuse de nos vices. 72 . J’ai vu des personnes qui étaient, pour ainsi dire, montées au dernier degré de la pénitence. Elles avaient une contrition si vive et si poignante de leurs péchés, qu’elles allaient jusqu’à vomir du sang. Cette vue m’a rappelé ces paroles du psalmiste : « J’ai été frappé, Seigneur, par les fléaux de votre colère, comme l’herbe l’est par les rayons du soleil, et mon coeur s’est desséché » (Ps 101,5). 73. Les larmes que la crainte de Dieu nous fait répandre, produisent en nous la crainte de les voir tarir et la vigilance nécessaire pour les conserver. Ceux qui ne pleurent leurs péchés que par un mouvement d’une charité peu enflammée et qui n’a pas la perfection requise, les auront bientôt vues disparaître. Il ne faut pas en dire autant de ceux qui pleurent leurs fautes, parce que leur coeur est embrasé dans le temps d’un feu digne d’une éternelle mémoire; et disons ici, pleins d’admiration, que dans notre pénitence c’est ce qu’il y a de plus humble et de plus abject, qui nous donne réellement et plus d’assurance et plus de certitude qu’elle plaît à Dieu. 74. Il y a des choses qui font tarir les larmes de la pénitence, et il y en a d’autres qui y mêlent, si j’ose m’exprimer ainsi, de la boue et des bêtes sauvages. Les premières furent cause de l’inceste de Loth avec ses deux filles, et les secondes, de la chute de Lucifer et de ses anges. 75. Elle est vraiment incroyable, la malice des ennemis de notre salut : ils se servent de tout pour changer nos vertus en vices, et pour nous donner de l’orgueil dans les choses mêmes qui devraient nous couvrir de confusion. 76. La solitude, où nous sommes, les cellules que nous occupons, et différents objets que nous rencontrons, sont quelquefois capables de nous porter à la componction; et n’est-ce pas ce que notre Seigneur, Élie et saint Jean Baptiste nous apprennent par leur exemple ? Car ils se retirèrent dans le désert pour y vaquer plus librement à la prière, et pour offrir à Dieu, le tribut de leurs larmes. 77. Cependant il arrive, et j’ai vu moi-même, que dans le sein des villes et qu’au milieu du tumulte et des agitations du siècle, des moines versent des larmes abondantes. Mais ne nous y trompons pas; c’est une ruse, c’est une tromperie du démon : il veut nous engager par là à rentrer dans le monde, en nous faisant croire que nous ne souffririons aucun dommage ni aucune perte spirituelle, si nous fréquentions les hommes, et que nous fussions au milieu des choses et des affaires du siècle; que par conséquent c’est à tort que nous redoutons si fort le monde et ses agitations tumultueuses. 78. Ne perdons pas de vue qu’il est souvent arrivé qu’une seule parole a pu suffire pour faire sécher la source des larmes dans une âme pénitente. 79. Peut-on dire que, sans une espèce de miracle, une seule parole ait pu les faire couler de nouveau ? Eh ! Mes tendres amis, à l’heure de notre mort, le souverain Juge ne nous fera pas un crime de n’avoir pas fait des miracles pendant notre vie, de n’avoir pas traité avec subtilité les matières élevées de la théologie, et de n’être pas parvenus à un haut degré de contemplation, mais de n’avoir pas pleuré nos péchés de manière à en mériter le pardon. Tel est le septième degré de l’échelle du paradis. Que celui qui y est monté, daigne me tendre la main, car ce n’est que par le secours de quelqu’autre, qu’il y est monté lui-même, et qu’il s’est purifié des péchés qu’il avait commis pendant sa vie. |
Source : http://www.livres-mystiques.com/partieTEXTES/Climaque/Echelle/climaque.htm#1
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