L’archiprêtre Avvakoum, dont nous fêtons les 400 ans de la naissance cette année, fut le héros de la révolte des croyants russes contre les réformes liturgiques du patriarche Nikon, dans les années 1660.
Erigé en saint par les vieux-croyants actuels, il fut brûlé en place publique par les autorités sans que soit résolu le problème de l’opposition d’une partie de la population russe.
Le patriarche Nikon fut déposé, mais les réformes perdurèrent. L’orthodoxie russe, dont Avvakoum affirmait qu’elle était la seule vraie religion, s’aligna sur les usages des autres églises. Des groupes de résistants, éparses, chassés par le pouvoir en place, prirent des chemins spirituels différents.
Saint ou hérétique ? Difficile de se faire une idée après avoir lu l’autobiographie de cet homme hors norme. Les mœurs du temps, le contexte international, la vision à court terme, tout a concouru pour que le schisme qui en résulta soit une déchirure grave, et pérenne. Le ton avec lequel Avvakoum rédige ses mémoires (« La vie de l’Archiprêtre Avvakoum écrite par lui-même ») en dit long sur l’ambiance délétère qui agite cette période.
La droiture de ses intentions est incontestable. Compliqué néanmoins de cerner ce personnage sombre, exalté, dernier auteur à s’exprimer en slavon. Mais on se contentera volontiers de cette description qu’il fit de lui-même :
« Maintenant, à tout vrai croyant je demande pardon, il y a eu des choses, ce me semble, touchant ma vie, dont il ne faudrait point parler. Mais j’ai lu les Actes des Apôtres et les Epîtres de Paul : les apôtres se déclaraient eux-mêmes, quand Dieu agissait par eux : non pas à nous, mais à notre Dieu soir la gloire ! Moi je ne suis rien. J’ai dit et je dis encore : je pécheur, fornicateur et ravisseur, larron et meurtrier, ami des publicains et des pécheurs et, pour tout homme, hypocrite maudit. Pardonnez donc et priez pour moi. Et moi je dois prier pour vous, qui me lisez ou écoutez. Je n’en sais pas plus long. Et ce que je fais, je le raconte aux gens. Qu’ils prient Dieu pour moi ! Au jour de l’éternité, tous alors reconnaîtront mes actes, ou bons, ou mauvais. Je suis ignorant en paroles, mais non pas en entendement. Je n’ai étudié dialectique, ni rhétorique, ni philosophie, mais l’entendement du Christ je l’ai en moi, comme parle l’Apôtre : je suis simple en paroles, non point en entendement. »
Tikhon